Être noire, ce n’est pas forcément être africaine. Depuis qu’elle fait carrière dans les lettres, la nouvelle lauréate du Prix Goncourt lutte contre cette simplification. Née à Pithiviers, le jour de la Sainte-Clotilde il y a quarante-deux ans, elle grandit dans la banlieue parisienne.
Son père, Sénégalais, a quitté la France pour l’Afrique lorsqu’elle avait un an. Elle ne fera connaissance que bien plus tard avec le continent africain. Élevée par sa mère, professeur de sciences naturelles, la petite Marie commence à écrire vers l’âge de treize ans. Elle se trouve encore en terminale quand l’éditeur Jérome Lindon la repère.
Début d’une carrière littéraire fulgurante, en dépit d’une œuvre exigeante (un de ses premiers livres est constitué d’une seule phrase), qui évolue toutefois au fil des romans vers un certain classicisme. Avant son Goncourt, la jeune romancière a déjà obtenu un Femina, en 2001, pour « Rosie Carpe », et elle a le privilège rare de voir une de ses pièces, « Papa doit manger », inscrite au répertoire de la Comédie-Française.
Précoce en tout, elle s’est mariée à vingt-deux ans avec le père de ses trois enfants, l’écrivain Jean-Yves Cendrey, qui lui avait écrit une lettre de lecteur à propos de son premier livre, à laquelle elle avait répondu. Le flot de courrier que lui vaudra cette fois son Goncourt aurait rendu la rencontre plus difficile.
Marie NDiaye a déclaré à la presse, en arrivant devant le restaurant Drouant où le prestigieux prix venait de lui être attribué : »Je suis très contente pour le livre et pour l’éditeur. Je suis très contente d’être une femme qui reçoit le prix Goncourt. »
« Une sorte de miracle s’était déjà produit avec le succès du livre », a-t-elle dit, ajoutant : « Ce prix est inattendu. C’est aussi le couronnement et la récompense de vingt-cinq ans d’écriture et de cette opiniâtreté. » Ce livre « est le portrait de trois femmes fortes, chacune à sa manière. Ce qui les unit, c’est une force profonde, une croyance en qui elles sont, une façon de ne jamais douter de leur propre humanité. Ce sont des femmes tranquillement puissantes ».
Marie NDiaye a dit espérer que cette récompense permette de mieux faire connaître l’histoire des femmes africaines. « L’histoire des migrants est une histoire déjà souvent relatée, mais si le sort de ces gens peut être encore mieux su et compris, j’en serai très contente. »
source: Les Echos, le Monde.fr