Trente-sept ans de parcours professionnel et vous gardez toujours cette fraîcheur, cette beauté qui semble être inoxydable comme la salsa. On dirait que vous n’êtes pas marqué par le temps ? Quel est donc votre secret ?
(Air étonné). Oh ! Je n’ai pas de secret ! Vous me voyez là, je n’ai même pas mis de maquillage (rires…). Ceux qui me connaissent, ceux qui viennent me visiter, et ceux avec qui je suis souvent vont vous dire que je suis comme ça. Donc c’est dans la vie je pense que la beauté vient de l’intérieur. Ce n’est pas seulement ce qu’on regarde. Moi je ne suis pas belle. J’ai vu des beautés. Je pense que quand les gens disent aujourd’hui qu’Afia Mala est belle, je pense qu’ils essaient seulement de regarder mon cœur. Ça je le sais. Je sais que j’ai un cœur qui fait parti des meilleurs cœurs et c’est tout. Et la beauté on peut dire aussi que c’est la joie de l’intérieur. Parce que je dis souvent que ; même si on n’a rien à manger, quand on sort il ne faut pas le montrer. J’ai vécu au Congo l’ancien Zaire, Congo Kinshasa. J’ai vu le départ de feu Mobutu, et l’arrivée de feu Kabila. Les deux feux présidents. Donc il y’avait la guerre. Ce que j’ai retenu là- bas, c’est que les congolais quand ils sortaient ils n’avaient pas de l’arme aux yeux. Ils étaient toujours gais. Et moi, je ne comprenais rien. J’étais malheureuse comme tout. C’est comme s’il n’y a rien qui se passait dans leur pays. Et ils disaient toujours, jusqu’aujourd’hui « Maman Afia ça va aller ». Donc il faut dire : « ça va aller, et ça ira ». (Rires…)
Quel effet ça vous fait quand on dit que vous faites parti de ceux là qui ont désenclavé la musique Togolaise ?
Ah ! Oui là, sans modestie, je dis que j’ai fais quelques choses. Je vais vous dire quelque chose mais ne soyez pas choqué même si mon pays ne m’a rien fait. Mon pays ne m’a jamais aidé en tant que tel, mon pays ne m’a jamais envoyé nulle part pour le représenter. Mon pays ne m’a jamais payé un billet d’avion pour aller le représenter. Les autres sont toujours partis représenter le Togo dignement aux frais du pays ; mais moi non. Mais je sais que je l’ai représentée aussi ; et si demain je ne suis plus là, et si le moment vient que je parte, je partirai tranquillement parce que je dirai que j’ai fais quelque chose pour mon pays. Voilà je suis fière.
Qu’est-ce que cela vous fait de savoir que vous êtes le premier artiste à fédérer les togolais autour d’une musique, la salsa je veux dire.
Oui. Là, je dirai bon il y’a d’autre qui ont fait la Salsa avant moi ici. Mais la salsa que j’ai amenée aujourd’hui au Togo, c’est la salsa pure. C’est la vraie Salsa. Peut être que demain je… (elle traîne un peu) je ferai quoi ? Je ferai du rap pourquoi pas ?
Ou le cool catche ?
Ah ! Ah ! Oui c’est bien ça le cool catche. C’est beau hein ! Peut être demain je le ferai aussi.
Afia Mala, c’est aussi des duos avec des sommités de la musique mondiale en occurrence Manu Dibango, Lokua Kanza, Patricia Kass, et bien d’autres encore. Des expériences, des souvenirs…
J’appelle Manu Dibango « papa » et lui il a l’habitude de m’appeler « ma fille ». Je me rappelle de la dernière fois que je l’ai vu. C’était à Brazzaville. On était là pour le FESPAM quand il m’a vu, il m’a regardé et puis il a appuyé son index sur mon front. Il m’a regardé et il m’a dit « toi cette femme là, est ce que tu sais que tu as trois front ? (Rires…) je dis : « qu’est ce que ça veut dire » ? Il répond : « le front que tu as là, va te regarder encore dans le miroir, tu verras que tu as trois front. Le front là à un cerveau », ajoute-t-il. Parce que ce n’est pas aujourd’hui que tu as commencé mais tu sais Afia. Je pense que toi tu feras comme moi. Je l’ai regardé droit dans les yeux et je lui ai dis quoi ? Papa je ferai quoi ? il dit mais non, « moi, j’ai commencé, j’ai traîné ma bosse jusqu’à trente ans et puis après voilà. Je suis là aujourd’hui je suis Manu Dibango ». T’inquiètes pas il m’a dit-il m’a répété encore « ça va aller ». Rires…