Etats-Unis: Les enfants de la Diaspora togolaise et le dilemme des langues

Comme toutes les autres diasporas, la diaspora togolaise de part le monde est confrontée a un dilemme : quelle langue parler a leurs enfants ? Le problème ne se pose pas tellement si l’enfant est né et a grandi au Togo avant de suivre ou de rejoindre ses parents a l’etranger. Il aura eu le temps d’apprendre et de parler sa langue maternelle et/ou le francais avant d’etre confronte a la langue du pays d’accueil. C’est encore plus facile s’il s’agit d’un pays francophone, comme la France par exemple, a moins que l’un des parents ne soit pas francophone et veuille apprendre a l’enfant sa langue. Je vais plus me concentrer sur le cas des Etats-Unis. Au depart les togolais essayaient de parler anglais a leurs enfants nés au pays de l’oncle Sam, mais se sont vite rendus compte qu’il s’agissait d’une mauvaise approche. << On s’est rendu compte que notre fils perdait ainsi sa culture en ignorant sa langue maternelle >> confie Armand, jeune analyste financier dans une banque de New –York. Armand et Sylvie tous deux togolais s’exprimaient généralement en Mina

ou en Francais a la maison , mais s’adressaient a Kevin, leur enfant uniquement en Anglais.  Finalement lorsqu’ils allaient chez d’autres amis togolais ou lors de soirées togolaises ils ont remarqué que les autres enfants parlaient aussi bien l’anglais que le français ou le mina.

<< Il faut leur parler la langue maternelle et le français, car l’ecole se charge deja de leur apprendre l’anglais >> declare Essenam , caissieère dans un supermarché a Germantown dans l’Etat de Maryland. << Mon mari et moi nous leur parlons toujours mina ; au depart ils nous repondaient en anglais mais maintenant ils parlent couramment leur langue maternelle >> ajoute telle fière et souriante.

Ce constat est également partage par d’autres parents qui estiment que même lorsqu’ils finissent par comprendre leur langue maternelle, certains enfants préfèrent repondre en Anglais ou en Francais. Peut être par crainte de faire une faute ou de mal prononcer ou alors par honte de parler une langue étrangere a eux. D’autres enfants parlent une langue hybride en mélangeant le francais, l’anglais , le mina…. Il n’est pas rare d’entendre un enfant vous repondre << Ele in the kitchen>> ( elle est dans la cuisine : mina – anglais ) ou << Papa is sleeping dans la chambre >> ( papa dort dans la chambre : mina-anglais – francais ) .

Pour certains il ne suffit pas seulement qu’ils comprennent mais il faut qu’ils parlent leur langue maternelle. Kokou, infirmier dans un hôpital de Chicago dans l’Etat de l’Illinois me raconte les vacances assez difficiles qu’il vient de passer a Lome. << Je devais souvent lui servir d’interprete dans son propre pays ; il ne pouvait pas causer avec ses grand-parents sans moi ou sa mère a côté ou même jouer avec ses petits cousins ou les enfants du quartier. Ca m’a vraiment gêné que la langue soit ainsi une barrière pour lui. >> Kokou a peur que son fils Anthony ne soit exclu de sa propre société de part son incapacité à parler la langue et donc de s’intégrer pleinement. Il pense l’amener assez regulièrement au Togo en vacances.

D’autres , comme Joe, juriste dans un cabinet d’avocats a Oakland en Californie , ont une solution plus radicale: envoyer l’enfant pour 3 ou 5 ans rester au Togo. Dans les couples où les deux parents sont de differentes ethnies , chacun essaie d’inculquer sa langue à l’enfant ; La maman d’Aneho lui parlera mina alors que le papa de Sokode lui parlera kotokoli.

L’inquiétude de certains qui redoutent que l’enfant s’embrouille si on lui parle trop de langues differentes ne semble pas fonde quand on sait que dans l’enfance il est plus facile d’assimiler les langues qu’a l’age adulte. Alors quelle est la solution? Il n’y a pas de solution miracle. Chacun a son approche de solution selon les objectifs qu’il se fixe a lui et a son enfant. Une approche raisonnable serait de laisser l’anglais et l’espagnol (2e langue aux Etats-Unis) a l’ecole et de parler la langue maternelle et le francais a la maison.

On peut parfois faire des exceptions par exemple pour l’aider a faire ses devoirs de maison ou pour s’exercer soi-même à l’anglais. En effet certains estiment que parler l’anglais avec leur enfant leur permet de mieux comprendre la langue et de soigner leur pronociation d’autant plus que les petits togolo-americains n’ hésitant pas à corriger leurs parents lorsqu’ils font des fautes , même en public. Pamela , coiffeuse à Atlanta dans l’Etat de Georgie avoue avoir beaucoup appris avec Kimberley , sa fille. << Au depart j’étais embarassée lorsqu’elle me corrigeait en public, mais par la suite je l’ai banalisé en le prenant avec humour; mais j’ai fait beaucoup de progrès avec elle car je parlais a peine l’anglais lorsque je suis venu rejoindre mon mari ici >>.

Ces enfants de la diaspora nés ici se considèrent a raison plus americains que togolais mais nous devons faire des efforts pour leur rappeler leur origine et cela passe par la langue , les coutumes et un contact regulier avec leur pays d’origine, le Togo. Cette situation si on sait bien la gerer risqué d’être un atout dans quelques années ou on aura des milliers de togolais americains parfaitement polyglottes.

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