Dans sa somptueuse villa située dans la banlieue-est de Lomé (Togo), précisément à Baguida (Une ville située à 15 km de Lomé), la diva de la musique Togolaise Afiwavi Mawulana Missohoun dite Afia Mala natif de Vo, nous reçoit. Sans protocole la salsera évoque les moments forts de sa vie professionnelle, et les 37 ans de carrière qu’elle prépare activement. Dans un décor simplice et glamour, elle dit…presque tout.
Que peut-on retenir de vos 37 ans de vie artistique ?
Beaucoup de chose. De très bonne chose d’ailleurs. Je parle de la vie, de ma vie en générale de ma vie artistique. J’ai fais beaucoup de chose ; j’ai visité beaucoup de pays grâce à ce métier donc aujourd’hui je ne peux que dire que je suis une femme comblée.
Trente-sept ans de scène. N’avez-vous pas eu, à un moment donné, l’impression que le temps est vite passé ?
On peut le dire comme ça. Le temps n’est pas passé (rires…). Le temps passe et on est là parce que… Si je regarde un peu dans le rétroviseur mes débuts, les difficultés, les angoisses de ce métier, je sais que le temps passe vite mais la seule chose que je peux vous dire c’est que je sais qu’il me reste encore beaucoup de chose à faire et beaucoup de chose à donner.
Vous semblez être une « éternelle amoureuse » de la salsa en Afrique jusqu’à en devenir l’unique diva. Pourquoi cet amour pour ce genre musical ?
Oui…je peux dire l’amour de la musique en générale, pas que la Salsa. Mais, si aujourd’hui j’ai sorti un album complètement Salsa, je n’ai réalisé qu’un rêve. Quand on se réfère à l’histoire, .je ne veux pas faire un cours d’histoire à vos lecteurs. Mais on peut dire que nos aïeuls ont été colonisés par l’Amérique ils sont partis, ils ont fait le tour : l’Amérique Latine, et patatra…, ils ont fait des enfants. Ils ont prit un peu de cette culture là. Ils sont revenus avec cette culture et nous nous sommes baignés dans cette musique là. Le Togo a connu quand même beaucoup de colonisation sinon il n’y aura pas de Da- Silveira, ni les D’Almeida, les Lawson etc.… Donc ce qui veut dire que la musique la musique togolaise, la musique ouest-africaine rentre un peu dans ce domaine de la Salsa. Je peux dire même que nos aïeuls ils ont fait de la Salsa (Rire…). Vous prenez un peu la musique togolaise, la musique béninoise dès ses débuts ; vous allez retrouver ces pas, ces rythmes. Le feu Gnonnas Pédro faisait de la Salsa. Et comment ? On a parlé de quelqu’un qui n’est plus de ce monde mais aujourd’hui on parle encore de quelqu’un qui est là : Boncana Maiga! Il est de l’Afrique de l’ouest, mais il fait aussi de la Salsa. Je peux dire aujourd’hui que je suis la seule femme en Afrique noire à faire de la Salsa. Ce n’est pas un privilège, mais c’est quand même un (Rires…). Parce que ce n’est pas donné. J’ai fais des recherches, j’ai passé des nuits blanches pour arriver à cet album. J’ai quitté mon pays, je suis parti à la rencontre de ces gens qui ont crée la Salsa et qui ont vécu la Salsa et toute leur vie, ils ne font que de la Salsa. C’est leur travaille. Ils sont payé comme un fonctionnaire à Cuba. La Salsa se transmet de père en fils. C’est pour cela que je suis partie là pour avoir une vraie Salsa. Je vais faire bientôt mes 37 ans de métier et j’espère que tout le monde viendra faire la fête avec moi.
Pourquoi précisément le choix de la Cuba ?
Oui à cuba, ils ont les meilleurs musiciens, ils ont l’un des meilleurs studios du monde qui est la « Egrem ». Pour la petite histoire, quand je suis sortie du studio il y a Charles Aznavour qui me suivait directement. J’ai eu la chance de le rencontrer…je peux dire que j’ai bien fait d’aller là bas. Et j’ai été très bien entourée, j’ai rencontrée des gens très bien j’ai eu cette chance là aussi de rencontrer celui qu’on appelle les doigts d’or, le meilleur percussionniste du monde ou celui que l’on appelait Tata Guinness et je suis la dernière personne qu’il a arrangée. Je pense qu’être partie à Cuba m’a rapporté beaucoup de chose du point de vu professionnel.
Trente-sept ans de parcours professionnel et vous gardez toujours cette fraîcheur, cette beauté qui semble être inoxydable comme la salsa. On dirait que vous n’êtes pas marqué par le temps ? Quel est donc votre secret ?
(Air étonné). Oh ! Je n’ai pas de secret ! Vous me voyez là, je n’ai même pas mis de maquillage (rires…). Ceux qui me connaissent, ceux qui viennent me visiter, et ceux avec qui je suis souvent vont vous dire que je suis comme ça. Donc c’est dans la vie je pense que la beauté vient de l’intérieur. Ce n’est pas seulement ce qu’on regarde. Moi je ne suis pas belle. J’ai vu des beautés. Je pense que quand les gens disent aujourd’hui qu’Afia Mala est belle, je pense qu’ils essaient seulement de regarder mon cœur. Ça je le sais. Je sais que j’ai un cœur qui fait parti des meilleurs cœurs et c’est tout. Et la beauté on peut dire aussi que c’est la joie de l’intérieur. Parce que je dis souvent que ; même si on n’a rien à manger, quand on sort il ne faut pas le montrer. J’ai vécu au Congo l’ancien Zaire, Congo Kinshasa. J’ai vu le départ de feu Mobutu, et l’arrivée de feu Kabila. Les deux feux présidents. Donc il y’avait la guerre. Ce que j’ai retenu là- bas, c’est que les congolais quand ils sortaient ils n’avaient pas de l’arme aux yeux. Ils étaient toujours gais. Et moi, je ne comprenais rien. J’étais malheureuse comme tout. C’est comme s’il n’y a rien qui se passait dans leur pays. Et ils disaient toujours, jusqu’aujourd’hui « Maman Afia ça va aller ». Donc il faut dire : « ça va aller, et ça ira ». (Rires…)
Quel effet ça vous fait quand on dit que vous faites parti de ceux là qui ont désenclavé la musique Togolaise ?
Ah ! Oui là, sans modestie, je dis que j’ai fais quelques choses. Je vais vous dire quelque chose mais ne soyez pas choqué même si mon pays ne m’a rien fait. Mon pays ne m’a jamais aidé en tant que tel, mon pays ne m’a jamais envoyé nulle part pour le représenter. Mon pays ne m’a jamais payé un billet d’avion pour aller le représenter. Les autres sont toujours partis représenter le Togo dignement aux frais du pays ; mais moi non. Mais je sais que je l’ai représentée aussi ; et si demain je ne suis plus là, et si le moment vient que je parte, je partirai tranquillement parce que je dirai que j’ai fais quelque chose pour mon pays. Voilà je suis fière.
Qu’est-ce que cela vous fait de savoir que vous êtes le premier artiste à fédérer les togolais autour d’une musique, la salsa je veux dire.
Oui. Là, je dirai bon il y’a d’autre qui ont fait la Salsa avant moi ici. Mais la salsa que j’ai amenée aujourd’hui au Togo, c’est la salsa pure. C’est la vraie Salsa. Peut être que demain je… (elle traîne un peu) je ferai quoi ? Je ferai du rap pourquoi pas ?
Ou le cool catche ?
Ah ! Ah ! Oui c’est bien ça le cool catche. C’est beau hein ! Peut être demain je le ferai aussi.
Afia Mala, c’est aussi des duos avec des sommités de la musique mondiale en occurrence Manu Dibango, Lokua Kanza, Patricia Kass, et bien d’autres encore. Des expériences, des souvenirs…
J’appelle Manu Dibango « papa » et lui il a l’habitude de m’appeler « ma fille ». Je me rappelle de la dernière fois que je l’ai vu. C’était à Brazzaville. On était là pour le FESPAM quand il m’a vu, il m’a regardé et puis il a appuyé son index sur mon front. Il m’a regardé et il m’a dit « toi cette femme là, est ce que tu sais que tu as trois front ? (Rires…) je dis : « qu’est ce que ça veut dire » ? Il répond : « le front que tu as là, va te regarder encore dans le miroir, tu verras que tu as trois front. Le front là à un cerveau », ajoute-t-il. Parce que ce n’est pas aujourd’hui que tu as commencé mais tu sais Afia. Je pense que toi tu feras comme moi. Je l’ai regardé droit dans les yeux et je lui ai dis quoi ? Papa je ferai quoi ? il dit mais non, « moi, j’ai commencé, j’ai traîné ma bosse jusqu’à trente ans et puis après voilà. Je suis là aujourd’hui je suis Manu Dibango ». T’inquiètes pas il m’a dit-il m’a répété encore « ça va aller ». Rires…
Tu as fait tellement de scène de part le monde et à chacune de vos parutions, le public semble envoûté. Alors qu’elle est ce secret ?
Non ! Je crois que c’est le travail. Je n’ai pas de secret. C’est le travail à part le travail, il y’a cette volonté de faire. Je pense qu’avec la volonté on peut tout faire. Nul ne peut rien contre la volonté.
Afia Mala, c’est un globe trotter. Dans quelle ville aimeriez-vous aller prester une fois encore ? La ville qui vous a le plus marquée ?
C’est le Kansestan. J’étais au Kansestan trois fois. Toujours sur des scènes prestigieuses. J’ai joué avec Julio Iglesias, j’ai joué avec Paatricia Kass, avec d’autres artistes de renoms. C’était une scène que je n’ai plus jamais rencontrée jusqu’à ce jour. J’aimerais un jour encore retourner jouer à Almati Kansestan ; franchement je rêve d’y retourner. Je pense que c’est la plus belle scène que j’ai faite.
Quel est le beau jour de la vie d’Afia ?
Le beau jour de ma vie serait le jour où je mourrai sur scène. Ah oui le jour là serait le beau jour de ma vie (Rires…)
Trente-sept ans de carrière, qu’est ce que les Togolais peuvent attendre de cette célébration ?
Ça va être du boom! Les artistes invités, je pense qu’on en parlera plus tard.
Quelques noms…
Le public va voir quelques choses d’inédites. Il y’aura des artistes qui n’ont jamais frôlés le sol togolais. Ces artistes seront là. Ce sera des artistes de renoms.
Le lieu où va se dérouler le concert ?
Oui ça aussi je le dirai.
Quel regard portez-vous aujourd’hui sur la musique togolaise dans son ensemble ?
Je peux dire que la musique togolaise a beaucoup prit de l’ampleur grâce aux jeunes aussi parce que les anciens se sont un peu retirés. Je ne leur en veux pas parce qu’aujourd’hui la musique en générale se retrouve dans des épis à cause de la piraterie. La musique ne nourrit plus tellement son homme, il n’y a pas de producteur, il n’y a pas des éditeurs au Togo. Voilà ! Mais il y’a quelques jeunes aussi qui essayent de vraiment monter le flambeau de la musique togolaise. Je leur dis merci aussi parce que ce n’est pas facile et aussi du courage. Prenez quelqu’un comme King Mensah. Il est là il est toujours là. Je sais que c’est très difficile pour lui comme c’est difficile pour moi. Mais il est là, on le voit sur la scène, il tient bon et puis tous les autres. Donc courage ça va aller. Rires…
Un mot à l’endroit de la nation Togolaise à l’occasion de la célébration de vos 37 ans de carrière.
Je les convie à venir assister à cet anniversaire. Et qu’ils soient là nombreux. Il faut qu’ils nous supportent parce que je pense qu’il aura tous les artistes. Et je leur dis merci !merci du fond de mon cœur.